Ardennes Thiérache

Le duc d’En­­ghien a-t-il eu au moins un regard pour elle ? Car forcé­­ment il est passé à côté, peut-être même le vainqueur de la bataille de Rocroi y est-il entré ? Ça devait être le 18 mai 1643. Il venait de passer la nuit à la Cour des Prés, à Rumi­­gny, avant de lancer ses troupes vers le haut-lieu de sa gloire future en traver­­sant Bossus, Antheny, La Neuville-aux-Tour­­neurs, Auvillers et Etei­­gniè­­res… A Bossus, qui en avait telle­­ment et depuis si long­­temps bavé, comme d’autres, des courses des régu­­liers, des soudards en vadrouille et des réqui­­si­­tions, peut-être qu’on n’était pas peu fier de voir passer une si vaillante armée. Peut-être qu’on a vécu l’évè­­ne­­ment comme une sorte de conso­­la­­tion … A moins qu’à nouveau, par réflexe, la plupart ait couru se réfu­­gier à Saint-Martin, prête, elle depuis soixante ans à affron­­ter les pires dangers. L’église avait été construite en 1575, élevée en pierre blanche, avec tout ce qu’il fallait pour dissua­­der un quel­­conque assaillant de s’aven­­tu­­rer plus loin. Des ouver­­tures de tir assurent la défense du site. Et qu’im­­porte qu’elle soit de dimen­­sions modestes, que sa longue nef un peu étroite, elle s’était dotée d’une tour-porche massive, carrée et basses, de deux tourelles de chaque côté du chevet, de mâchi­­cou­­lis, de meur­­trières. Saint-Martin avait su être forte sans cesser d’être élégante. C’est toujours le cas.